Étape 5 : Les Lestrygons
La cinquième étape de son long périple se situe pour certains au nord de la Sicile, pour d’autres au sud de la Corse ou encore au nord de la Sardaigne.
Odyssée, chant X :
Durant six jours, six nuits, nous voguons sans relâche. Nous touchons, le septième, au pays Lestrygons, sous le bourg de Lamos, la haute Télépyle.
Nous entrons dans ce port bien connu des marins : Une double falaise, à pic et sans coupure, se dresse tout autour, et deux caps allongés qui se font vis-à-vis au-devant de l’entrée, en étranglent la bouche.
Ma flotte s’y engage et s’en va jusqu’au fond, gaillards contre gaillards, s’amarrer côte à côte…
Seul je reste au-dehors avec mon noir vaisseau ; sous le cap de l’entrée, je mets l’amarre en roche. De troupeaux ou d’humains, on ne voyait pas trace.
L’histoire
La flotte arrive sur une île où les navires accostent dans un port, près d’un chemin. Ulysse, toujours prudent, amarre le sien à un rocher un peu à l’écart. Il envoie trois émissaires à la rencontre des autochtones pour leur dire qu’ils viennent en paix.
Cette île est malgré tout très particulière, car les nuits sont si proches des jours que les pâtres qui ramènent les troupeaux à la bergerie pour y dormir croisent ceux qui les emmènent paraître.
Sur le chemin, les explorateurs croisent une belle jeune fille qui les amène jusqu’à une femme « aussi haute qu’une montagne ». Celle-ci appelle son mari, le chef Lestrygon, Antiphatès « le porte-parole ».
C’est alors que les trois hommes se retrouvent face à un homme énorme, gigantesque, qui tranche la tête d’un des leurs d’un seul coup d’épée, puis le dévore encore tout sanguinolent. Les deux autres éclaireurs parviennent à s’échapper et donnent l’alerte.
Les navires n’ont pas le temps d’appareiller que déjà des rochers pleuvent sur eux du haut des falaises les détruisant tous… à l’exception de celui d’Ulysse hors de portée.
Une horde de ces monstres immenses déferle alors sur les pauvres guerriers qui tentent de regagner la rive pour éviter de se noyer. Ils se font tous massacrer, les uns après les autres.
Tandis que les hommes d’Ulysse rament à toutes forces pour s’éloigner du rivage, le roi d’Ithaque s’aperçoit que les corps s’amoncèlent sur la plage. Il s’en étonne auprès d’un des éclaireurs qui lui souffle à l’oreille : « C’est pour faire un grand banquet. Ce sont des cannibales. »
L’interprétation
À l’image de cette île dont les jours et les nuits se chevauchent presque, le meilleur est souvent plus proche du pire qu’on ne le croit. Tout commence par le sourire d’une belle jeune fille pour se terminer dans l’estomac d’un peuple cannibale. D’une certaine façon, ces guerriers ont été dévorés par leur imprudence. Il est des domaines où il vaut mieux ne jamais poser les pieds.
Par ailleurs les Lestrygons comme les Cyclopes sont de monstrueux cannibales, d’une taille gigantesque, inhumaine. Il existe une certaine hiérarchie qui porte la réflexion. Si les dieux dépassent les hommes en taille, en beauté et en intelligence, tout ce qui est démesuré confine au malheur. Il en va ainsi de l’orgueil, de la possession, de l’envie, de la jalousie, de la cupidité… qui finissent par dévorer l’Homme lui-même quand ils prennent trop d’importance.
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Mythologos de Franck Senninger
Milon de Crotone a gagné les Jeux olympiques de lutte dans la catégorie des plus jeunes quand un « inconnu » du nom de Pythagore lui annonce qu’il ne remportera plus jamais de victoires à moins qu’il ne suive ses conseils.
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